dimanche 20 avril 2014

Bienvenue en enfer !

Sandrine Collette m'avait glacé le sang en 2013, je l'attendais donc au tournant en 2014 avec son tout dernier roman. Avec beaucoup d'appréhension car comment renouveler un coup de maître, comment faire mieux, ou du moins tout aussi bien ? Je n'ai pas lésiné sur les moyens pour m'attaquer à son deuxième thriller psychologique. En avril, je suis allée la rencontrer aux Quais du polar à Lyon, le must du festival de roman policier dans l'Hexagone. Invitée parmi les poids lourds du genre en ce moment : Ellroy (en guest star, sollicité de toutes parts..) Läckberg, star descendue tout droit de sa Suède natale, Deon Meyer, mon sud-africain préféré, Franck Thilliez et Karine Giebel, couple royal  du thriller français, et j'en passe et des meilleurs et souvent aussi plus discrets... Parmi ceux-là, Sandrine Collette ! Coincée entre deux autres bonnes plumes mais facile à trouver pour toute bonne lectrice  persévérante comme moi ...

Revenons-en aux faits. Un vent de cendres commence par un accident. A couper le souffle. C'est moi qui conduis, moi qui frêne violemment, les pneus qui crissent, moi qui suis prisonnière des taules froissées, les sirènes des secours qui  me transpercent... une description bluffante. Bilan : Andreas le conducteur et Octave un des passagers survivent. Laure la jeune femme qui les accompagne, celle qu' Andreas voulait épouser, ne sera pas épargnée.

Dix années ont passé. Les deux jeunes hommes se sont transformés  en morts vivants, Octave est défiguré. Ils ont trouvé refuge au cœur du vignoble de Champagne. En septembre de cette année, une équipe de vendangeurs arrivent à la propriété. Parmi eux, Camille. Par sa forte ressemblance avec Laure, elle fascine immédiatement Octave, et elle semble envoûtée par ce "monstre". Mais Malo son frangin qui l'accompagne veille sur elle et lui intime de se méfier de ce type au visage et à l'âme ravagés par l'accident. Andreas, qui vit cloîtré dans le maison du domaine, n'est pas dupe de leur petit manège. C'est alors que Malo se volatilise...

Si on pensait que Sandrine Collette en avait fini avec les horreurs dissimulées au fin fond de la campagne française, avec des personnages torturés et blessés dans leur chair et dans leur tête, alors on s'est trompés. Je ne sais pas si les deux hommes sont pires que les deux frangins des Noeuds d'acier, en tout cas, une fois de plus, l'espoir n'est pas de mise. Même si dans ce roman la tension grandit peu à peu et que la peur croit de façon latente, on se prend encore à croire à une fin raisonnablement "heureuse"...

Ce que j'apprécie surtout c'est la façon de raconter la fuite. La fuite du mal, les poursuites oppressantes dans des lieux clos, qui se soldent souvent de façon tragique. Une écriture et un rythme qui rappellent d'autres scènes ponctuées d'angoisses de même nature Délivrance, le labyrinthe de Shining. Et puis comme le précédent roman, Sandrine Collette s'attache à décrire des êtres ravagés et haineux. Andreas et Octave souffrent de blessures irrémédiables. "La mort de Laure est une blessure. Comme tout autre blessure, elle guérira de gré ou de force. Mais elle laissera une cicatrice. Qui lui fera mal par mauvais temps [...]Ou quand il y aura du vague à l'âme, comme on dit qu'il y a du vent. Une cicatrice refermée, qui restera  l'endroit le plus fragile de son corps et de son âme." En quelques lignes, voilà la clef de ce roman.

"Un vent de cendres" de Sandrine Collette, Ed Denoël, 2014

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