dimanche 16 août 2015

Yeruldelgger is back

Yeruldelgger le retour ! Et ça fait plaisir ! Je ne cache pas que je l'attendais.
Patrick Manoukian (alias Ian Manook) se trouvait face à un sacré défi : donner une suite aux enquêtes du flic mongol, après le succès de Yeruldelgger en 2014.
On retrouve d'ailleurs les personnages du premier opus. Notamment Colette la prostituée, découverte assassinée alors qu'elle avait rendez-vous avec Yeruldelgger. Afin d'échapper au complot dont il est la cible, le flic conduit lui-même l'enquête et tente de retrouver le gamin qu'elle avait adopté. Ses recherches le conduisent à nouveau sur les traces de Gantulga et il remonte la piste d'un sale trafic de gosses conduit comme du bétail en Europe par les réseaux de contrebande de Mongolie et de Russie. Pendant ce temps, ses coéquipiers cherchent à élucider deux morts très étranges. Oyun démêle les fils d'une affaire de yack tombé du ciel... Une situation cocasse de prime abord mais qui mettra en cause des militaires mongoles. Un terrain miné pour la jeune femme ! Sara, la fille de Yeruldelgger, refait surface aussi, rappelant à son père des blessures tout juste refermées.

Ça pue toujours autant en Mongolie, carrefour stratégique entre la Russie et la Chine. Terre de convoitises géopoliticiennes et de trafics en tout genre, qui ont des ramifications jusqu'en Europe et au Havre en France. Des flics y traquent aussi ces réseaux très protégés et fourrent leur nez dans des affaires qui déclenchent aussi la curiosité d'un journaliste. Ian Manook aime franchir les frontières dans ce roman.
Mais Ian Manook ne se contente pas de dévoiler les manigances politiciennes ou les trafics mafieux, il décrit les effets dévastateurs du nucléaire sur l'environnement en Russie. Il revient également encore sur la fin du nomadisme et il nous embarque dans les steppes mongoles.
Ouf ! Comme un îlot de bonheur à préserver, on retrouve Solongo et on respire à nouveau les parfums de sa yourte et, au fil du récit, ceux de bons plats traditionnels mongols - toujours aussi surprenants car après les marmottes en 2014, on sert cette fois-ci de la tête de chèvre bouillie.

Yeruldelgger ne serait plus aussi attachant sans une bonne dose de mysticisme. Le flic qui semble pencher du "côté obscure" dévoile parfois beaucoup de cruauté. Mais les moines du septième Monastère veillent sur lui comme une bonne fée. Et les loups le protègent contre le Mal. Certains passages sur le chamanisme sont envoûtants.

Dépaysement total, détours gastronomiques par la Mongolie, (et la Normandie !), dialogues pleins d'humour (Ian Manook aime Les Tontons flingueurs à coup sûr...), intrigues prenantes et  personnages crédibles, attachants ou horripilants, mais qui ne laissent jamais indifférents, voilà la recette Yeruldelgger.
Alors oui, forcément, je serais déçue de ne pas retrouver prochainement  le flic mongol !

 Les temps sauvages, Yeruldelgger, de Ian Manook, éditions Albin Michel, 2015





jeudi 6 août 2015

Dust, poussière tu deviendras....


Cap sur l'Afrique. Où il est question des persécutions subies par les Albinos au Kenya et sur des croyances ancestrales ancrées sur le continent africain. Et de l'argent sale qui en découle....

En résumé : 2010. Dans un terrain vague de Nairobi, un gamin à vélo s’amuse à rouler dans une grande flaque sur le sable ocre. Du sang humain, répandu en forme de croix. Sans le savoir, le garçon vient de détruire une scène de crime, la première d’une longue série.
2012, à Nairobi. Une femme albinos est décapitée à la machette en pleine rue. Le tueur a emporté la tête, un bras aussi. Elle a été massacrée, comme beaucoup de ses semblables, parce que ses organes et son corps valent une vraie fortune sur le marché des talismans.
Appelée en renfort par le chef de la police kenyane, Hanah Baxter, profileuse de renom, va s’emparer des deux enquêtes.
Hanah connaît bien le Kenya, ce pays où l’envers du décor est violent, brûlant, déchiré entre ultramodernité et superstitions.
Mais elle ne s’attend pas à ce qu’elle va découvrir ici. Les croix de sang et les massacres d’albinos vont l’emmener très loin dans les profondeurs du mal.

Voilà, le résumé a l'odeur alléchante du bon thriller,  mais en fait j'ai été affreusement déçue !
Vraiment le sujet m'emballait, passionnant car peu médiatisé en France. Effroyable et révoltant. 

Dans de nombreux pays d’Afrique, dont le Kenya, l’albinos est considéré comme un être aux pouvoirs surnaturels ou, parfois, comme une créature maléfique. Les sorciers diffusaient ces croyances auprès de la population en promettant longue vie, richesse et pouvoir à qui consommerait des poudres et des substrats obtenus à partir des membres, des organes ou des cheveux d’albinos, qui se vendaient à prix d’or. Face à ce marché juteux, la chasse aux albinos se répandit en Afrique avant les années 2000, prenant au fil du temps un essor inquiétant.

Le sujet ne laisse pas indifférent, il vous saisit aux tripes même. Encore aujourd'hui, ce commerce très lucratif pousse de nombreux gamins à commettre des actes de violence d'une dureté invraisemblable, pour assurer leur survie et tenter de sortir frères et soeurs de la misère. Pour une poignée d'euros au profit de gros nababs, qui se gavent de profits nauséabonds.

Mais le style et l'écriture m'ont en contre partie complètement irisés le poil ! L'enquêtrice est bardée de clichés de bonnes séries télé : lesbienne, bouddhiste, new-yorkaise, mystique, médium, profileuse, un peu de coke avant d'aller se coucher. Un "personnage complexe" raté, un peu lourd à mettre en scène tout au long du récit. Alors il en perd rapidement de sa crédibilité. 
Le personnage de Darko Unger ne m'a pas plus convaincue, le double jeu du traître semble évident dès son apparition. On peut deviner rapidement également qui est le semeur  des croix de sang. 
Et quelques scènes dégoulinantes de guimauve.

Autre désagrément, l'écriture est parfois précipitée. Par exemple, Sonja Delzongle se débarrasse en quelques lignes de son serial killer ! Paf ! Un coup de frein et il quitte la scène. Sans parler du revirement de situation entre Hannah Baxter et l'inspecteur mexicain Mendoza (qui forcement en a bavé dans sa vie d'avant ! des anecdotes inutiles, qui n'apportent rien au récit ), ces deux-là, sont comme chien et chat dès le début du roman. Puis en deux paragraphes, le gros dur mexicain s'assouplit et Mendoza et Hannah deviennent les meilleurs amis du monde....
Beaucoup de surenchère aussi dans la succession des événements... L'assaut finale m'a laissé de marbre.
Stop n'en jetez plus ! Pourtant Sonja Delzongle avait une pépite avec ce sujet. Mais le résultat n'est pas à la hauteur. Dommage.

Dust de Sonja Delzongle aux éditions Denoël, Sueurs froides, 2015